C'est une véritable gifle que vient de recevoir Abdelaziz Bouteflika de la diaspora algérienne installée au Canada, qui a franchement boudé son assemblée électorale animée par Abdelkader Messahel, ministre délégué chargé des Affaires maghrébines et africaines, dépêché spécialement d'Alger pour l'occasion et coprésidée par le représentant du HMS au Canada, Rachid Boudjeâarane.

Seule une soixantaine de personnes se sont déplacées, dont une trentaine de partisans du président sortant, quelques sympathisants islamistes, des fidèles de Saïd Sadi, ainsi que des militants associatifs de la cause berbère, en plus d'une vingtaine d'autres curieux. Destinée à recueillir des sympathies auprès de la diaspora algérienne pour la candidature de Abdelaziz Bouteflika, la rencontre présidée par Abdelkader Messahel, a tourné en un véritable fiasco entre un ministre, évoquant les «moukharibine» et les «mouchaouichine», qui a perdu visiblement tout sang-froid et quelques participants critiques à l'égard du président sortant. La réaction du ministre a été violente et méprisante à l'égard de deux intervenants en particulier. Le premier, un homme d'affaires algérien installé au Canada depuis vingt-cinq ans, se disait outré par l'attitude du président Bouteflika lors de son passage à Montréal en 2000, lorsqu'il s'était adressé à la communauté en arabe littéraire dans un discours truffé de références à l'histoire d'Algérie. «Lorsque je me déplace pour écouter mon président, je ne m'attends de lui à ce qu'il me donne une leçon d'histoire. Pour nous, c'est méprisant qu'un président s'adresse à un parterre de francophones dans un arabe châtié que personne ne comprend», nous explique-t-il en entrevue. L'homme d'affaires qui n'a visiblement pas digéré le passage du président Bouteflika au Canada, se montre également sévère quant au traitement des hommes d'affaires algériens installés à l'étranger qui souhaiteraient participer au développement économique de leur pays d'origine. Irrité par les commentaires de l'homme d'affaires, Abdelkader Messahel lui a répliqué : «D'abord, lève-toi pour écouter la réponse, de toute façon... nous n'avons pas besoin de ton vote, que tu votes ou tu ne votes pas c'est la même chose pour nous.» L'autre réplique cinglante à l'égard du deuxième participant, un militant de la cause berbère, était digne d'un langage de voyou. «Attends-moi à la sortie...», a rétorqué le ministre insinuant clairement au participant qu'il allait lui régler son compte à la sortie ! D'autres thématiques ont été abordées : le statut de la langue tamazight, le code de la famille, le chômage, la crise du logement, le terrorisme, la concorde civile, le statut du FIS. Selon nombre de participants les réponses du ministre ont été évasives. Arrivé au Canada il y a deux ans, Salah, estime que le ministre n'était pas sûr de lui, «c'est comme s’il n'était pas convaincu de ce qu'il faisait, lorsqu'il nous dit que c'est le raïs qui a arrêté le terrorisme, ce n'est pas vrai tout le monde le sait», nous dit-il. Une femme nouvellement arrivée, nous dit ne pas avoir appris grand chose de la rencontre. «Pour me convaincre, il faut éradiquer le chômage dans notre pays, c'est aussi simple que cela.» Un autre participant affiche beaucoup d'inquiétude à l'égard de l’élection, «il n'y a dans cette campagne que de la violence et des menaces, on se demande comment ça va finir ? Si on arrive au 8 c'est bien... mais il vaut mieux attendre jusqu'au dix pour fêter et remercier Dieu si toute cette histoire se termine bien, car entre le 8 et les jours qui suivront tout peut arriver…» D'aucuns se demandent pourquoi tant d'amateurisme, de dénigrement et de mépris de la part d'un ministre venu spécialement d'Alger pour organiser la campagne électorale de son chef ? Contrairement à sa tournée européenne où les échanges dans la salle n'étaient pas permis, au Canada, le ministre s'est livré aux modalités des questions-réponses … et ça sentait fortement l'improvisation.

Source: http://elwatan.com/journal/html/2004/04/03/actualite.htm