Selon les notes révélées par le site WikiLeaks, l’Algérie constitue un des principaux sujets qui empêchent les responsables marocains de dormir.

 

À en croire les correspondances et notes des officiels américains de passage au royaume alaouite, leurs homologues marocains font une véritable fixation sur tout ce qui touche l’Algérie. Ils ne ratent aucune occasion de dénigrer l’Algérie où de salir son image, même si on ne leur demande pas leur avis sur la question.

En effet, dans leurs discussions avec les diplomates et les responsables américains de passage au Maroc, les officiels marocains font tout pour convaincre leurs interlocuteurs que la lutte antiterroriste des Algériens est un échec, et que ces derniers font preuve de mauvaise volonté pour coopérer avec eux dans ce domaine. Une note diplomatique américaine du 31 juillet 2007 indique que l’assistante du président US pour la sécurité intérieure et l'antiterrorisme, Frances Fragos Townsend cite nommément le directeur général pour la surveillance du territoire marocain, Abdelatif Hammouchi, qui affirme que “la coopération avec les Algériens est erratique. Parfois, ils nous fournissent de très bonnes informations et parfois on dirait qu'il s'agit d'impasse”. De son côté, Yassine Mansouri, le directeur général des études et de la documentation, (service de contre-espionnage marocain), qualifie les Algériens de “partenaires difficiles”. Toujours dans le domaine de la lutte antiterroriste, une note du 18 mai de la même année révèle que le directeur général des affaires bilatérales au ministère marocain des Affaires étrangères, Youssef Amrani, avait “suggéré que l'émergence d'Aqmi était principalement due aux échecs du gouvernement algérien”. Voilà une position que ne partageaient visiblement pas les États-Unis, lesquels défendent la politique antiterroriste de l'Algérie, comme le montre cette réplique d’un diplomate américain à l'accusation d’Amrani. “Le GSPC a été forcé de s'associer avec Aqmi parce que le gouvernement algérien a réussi à le marginaliser”. Idem pour Khalid Zerouali, en charge de la sécurité des frontières marocaines au ministère de l'Intérieur, qui “s'est hérissé” lorsque les officiels américains ont cité l'Algérie comme “un modèle” dans la lutte antiterroriste en Afrique du Nord. Ainsi, pour Zerouali, “le Maroc est beaucoup plus stable et sûr alors que je ne peux pas voyager d'Alger à Oran sans crainte”. Concernant les relations bilatérales qui ne s’arrangent pas avec Alger, Rabat impute la responsabilité entière à l’Algérie. Après une visite à Alger, Fouad Ali Himma, adjoint au ministre de l'Intérieur, a affirmé à des diplomates américains que “les efforts marocains répétés pour réduire l'abîme diplomatique ont été rejetés”. Dans leur mémo daté du 31 juillet 2007, ils indiquent que le responsable marocain “a assuré avoir dit aux Algériens que le Maroc était prêt à rouvrir sa frontière et à prendre d'autres mesures pour rétablir la confiance, mais les Algériens ne nous ont jamais dit ce qu'ils voulaient”.

Selon la même source qui précise que Himma est un proche du roi Mohammed VI, souvent considéré comme plus puissant que le ministre de l'Intérieur lui-même, “il a attribué ce qu'il décrit comme l'intransigeance algérienne à l'écart générationnel et de mentalités entre les dirigeants des deux pays”. Il est également révélé que le Maroc soupçonne depuis longtemps l'Algérie de chercher à développer un programme nucléaire militaire. Cette inquiétude est rapportée dans une note diplomatique américaine du 21 novembre 2006 transmise cinq jours après un entretien entre le secrétaire général du ministère des Affaires étrangères, Omar Hilale, et l'ambassadeur américain à Rabat au sujet du programme nucléaire de l'Iran. Hilale trouve qu'“un Iran doté de l'arme nucléaire serait un désastre pour la région et spécialement pour le Maroc”, d’autant plus que “cela provoquerait une course à l'armement dans la région et cela accélérerait la poursuite de ce qu'il a décrit comme un programme nucléaire militaire algérien similaire même s'il n'est que naissant”.

Plus catégorique, Hilale dira aux Américains : “Si l'Iran réussit, dans les dix ans, d'autres pays du Moyen-Orient auront la bombe et les Algériens suivront peu après”. Le dénigrement de l’Algérie est donc le sport favori des responsables marocains, quand bien même leurs interlocuteurs ne partagent pas leur vision sur le sujet. 

Source: Liberte