40 000 chercheurs ont quitté l’Algérie depuis 1996

Chaque année, 20 000 Africains hautement qualifiés quittent leurs pays pour aller vers les pays du Nord. Depuis 1990 à ce jour, ils sont quelque 300 000 spécialistes originaires d’Afrique installés en Europe et en Amérique du Nord. Ce sont les crises économiques et les répercussions sociales qu’elles induisent qui sont à l’origine du fléau de la fuite des cerveaux.

Omar Ramdan, le président du Forum des chefs d’entreprise, qui a annoncé ces statistiques de l’Organisation internationale des migrations (OIM), a dressé un bilan alarmant pour le continent noir qui, selon lui, «se vide dangereusement de sa matière grise».

Lors d’une conférence-débat sur la fuite des compétences et la revalorisation des élites nationales, organisée dimanche soir à Alger, M. Ramdan a cité d’autres facteurs à l’origine de l’exode des Africains, dont les conflits armés et les conditions de travail inadaptées, auxquels est venue s’ajouter la concurrence de plus en plus intense entre les pays développés en vue de capter la matière grise africaine à travers la mise en œuvre de «programmes d’immigration sélective».

Pour ce dossier, l’Algérie est lotie à la même enseigne que les autres pays africains. Le président du FCE, qui en a dressé un bilan préoccupant se référant à des statistiques et études réalisées par des différents organismes et institutions, a révélé que plus de 7 000 médecins algériens se sont installés en France jusqu’à juillet 2005, dont 2 000 dans la seule région parisienne, sur un ensemble de 10 000 médecins étrangers immigrés en Hexagone, alors que 40 000 chercheurs ont quitté l’Algérie depuis 1996.

De même, sur 25 pays fournisseurs d’immigrés au Canada, l’Algérie occupe la troisième place après la France et la Chine. Concernés directement par ce phénomène, les chefs d’entreprise représentent une large partie des Algériens expatriés vers la France avec près de 100 000 recensés récemment.

Ils emploient environ 2,2 millions de personnes et leur chiffre d’affaires global dépasse 15 milliards d’euros. D’après les constats tirés par le FCE, les métiers liés à la technologie de pointe (électronique et technologies de l’information et de la communication en particulier), à l’industrie énergétique et à la médecine sont ceux qui attirent plus l’élite algérienne.

Face à un tel phénomène, le FCE a proposé quelques recommandations que M. Ramdan a présentées à l’assistance et qui portent sur quatre points focaux. Il s’agit, en premier lieu, d’établir un diagnostic précis concernant l’ampleur quantitative et qualitative de l’expatriation des élites algériennes.

Le patron du FCE a jugé également nécessaire d’arrêter l’«hémorragie»à travers la mise en œuvre des moyens matériels, professionnels et sociaux permettant de retenir les cadres algériens. Il y a lieu aussi, ajoute M. Ramdan, d’adopter un programme visant à susciter le retour des compétences ou leur utilisation judicieuse à partir de l’étranger et, enfin, de revaloriser les statuts des chercheurs, des scientifiques, des cadres et autres professionnels qualifiés.

Par ailleurs, le débat a été chaudement animé par le professeur à l’université d’Alger, M. Abdelouahab Rezig, et l’ancien président-directeur général de Sonatrach et ancien ministre de l’Hydraulique, M. Abdelmadjid Attar. M. Attar, évoquant l’expérience du groupe face au phénomène de la fuite des cadres les plus compétents vers d’autres compagnies étrangères opérant dans le même secteur dans le Sud algérien, a souligné que les commodités matérielles représentaient le premier motif à ces derniers pour changer de cap.

«L’absence d’une véritable direction des ressources humaines au sein de nos entreprises et administrations qui prend en charge la gestion de la carrière des cadres»a contribué, de son côté, à aggraver la situation au sein de la compagnie, a soutenu M. Attar.

La publication d’une circulaire ministérielle interdisant aux cadres de Sonatrach d’opérer avec des sociétés pétrolières étrangères sur le territoire algérien ou encore la coopération avec les bourses d’emploi n’ont pas, toutefois, apporté les résultats espérés, a-t-il ajouté.

M. Rezig a, quant à lui, mis en exergue la nécessité de créer un commissariat national de prospective en vue de planifier et de mettre en œuvre une stratégie de gestion de carrière des cadres nationaux sur les moyen et long termes.

Omar Ramdan a cité d’autres chiffres publiés par l’Organisation pour la coopération et le développement économique (OCDE) faisant état de plus d’un million d’Africains titulaires d’un diplôme de l’enseignement supérieur et qui sont installés dans les pays industrialisés.

Pour faire face au déficit de leurs cadres, les pays africains sont obligés de dégager un montant colossal de 4 milliards de dollars annuellement pour l’emploi d’une centaine de milliers de coopérants étrangers.

Source: http://www.jeune-independant.com/display.php?articleId=26536