En 2007, la pomme de terre importée du Canada a défrayé la chronique. Il en est resté, dans les annales d’une partie de la presse algérienne, ce qui pourrait être appelé l’affaire « de la pomme de terre pour cochons » vendue aux Algériens.


Dans un contexte de pénurie sur le marché local, le gouverne ment a décidé d’exonérer les importations des taxes douanières et de la TVA du 1er juillet au 31 octobre 2007. Il s’agissait d’importer quelque 100.000 tonnes et cela a créé un « rush » chez les importateurs. Dans le lot des tubercules importées, « de mauvaise qualité par rapport au produit local », selon l’aveu du ministre du Commerce de l’époque, El Hachemi Djaâboub, figuraient des quantités impropres à la consommation et affectées par la « pourriture bactérienne circulaire  » (bacterial ring rot). Dans une de ces affaires, le ministère de l’Agriculture a porté plainte contre un importateur privé algérien et son fournisseur canadien pour certificats phytosanitaires non conformes. Il s’agit d’une Sarl, sise à El Eulma. Le procès de l’importateur algérien qui s’est déroulé en octobre 2008, soit un an plus tard, a révélé que 300 tonnes sur une cargaison de 3800 tonnes étaient affectées et auraient pu causer des dégâts sérieux à l’agriculture algérienne.

Interrogé par le juge, le patron de la Sarl a confirmé que c’était la première fois depuis ses débuts d’activité en 92 qu’il importait de la pomme de terre et qu’il était plutôt porté sur le verre et les métaux. Au sujet des 300 tonnes infectées par les bactéries, il a déclaré qu’il avait agi conformément aux conditions fixées par le ministère de l’Agriculture et qu’il « n’est pas responsable de la fraude commis par le fournisseur canadien ». Le juge lui a fait remarquer qu’il est « responsable » de l’approvisionnement des Algériens et qu’en contrepartie des exonérations de taxes décidées par l’Etat, la « moindre des choses  » qu’il pouvait faire était de s’assurer que la marchandise était saine.

L’IMPORTATEUR NE CONNAÎT QUE… L’ARABE

Alors que l’on faisait la lecture de l’expertise, l’importateur a déclaré ne pas comprendre le français et a demandé qu’on lui traduise en arabe. Ce qui a suscité une exclamation étonnée du juge : « un importateur qui ne connait pas la langue… c’est grave, vous devez apprendre… Quand il s’agit de la santé du citoyen, vous devez connaitre ce que vous importez ! C’est un microbe qui a failli rentrer au pays et détruire la production agricole ». L’importateur avait été condamné à 4 ans de prison ferme.

L’affaire qui révélait à quel point le secteur de l’import est, à tout le moins, peu professionnel et « très affairiste  », vient de rattraper le fournisseur canadien, du Nouveau- Brunswick. Il s’agit du nommé Henk Tepper qui est détenu depuis une cinquantaine de jours au Liban. Il a été arrêté par les services des douanes en vertu d’un mandat d’arrêt international algérien via Interpol. La presse canadienne a multiplié les articles sur les « malheurs » de Hank Tepper, son avocat canadien, Rodney Gillis, faisant tout pour attirer l’attention et mettre en cause l’absence de soutien de la part de l’administration canadienne. « Il n’a pas vu la lumière du jour depuis 45 jours, a déclaré son avocat canadien Rodney Gillis. Il est complètement frustré parce qu’il n’a pas commis de crime. Il n’a même jamais mis les pieds en Algérie. ».

LES « MALHEURS » DE HANK TEPPER

L’avocat a critiqué le ministère des Affaires étrangères et lui a demandé d’exercer des pressions sur Interpol afin de faire tomber l’avis de recherche contre M. Tepper. Seul moyen, selon lui, d’inciter les Libanais à libérer son client. Une porte-parole des Affaires étrangères canadien a indiqué que des « services consulaires » ont été offerts à M.Tepper et qu’ils sont en contact régulier avec la famille. Cependant, a précisé la porte-parole Ann Matejicka, « le gouvernement du Canada ne peut pas intervenir dans les affaires judiciaires d’un pays souverain, il ne peut pas solliciter de traitement préférentiel ou essayer de soustraire les citoyens canadiens de l’application régulière de la loi locale ».

Selon la presse canadienne, Hank Tepper reproche à l’administration canadienne de ne pas l’avoir informé des accusations portées contre lui par l’Algérie. Selon lui, la Canadian Food Inspection Agency et l’ambassade du Canada à Alger étaient au courant et ne l’ont pas alerté. « Ils ont toujours voulu que j’avoue avoir commis un faux. Je n’ai pas trafiqué de documents ».

Source : Le Quotidien d'Oran