Le 1er juin dernier, le chanteur Ferhat Mehenni avait annoncé depuis Paris la création du GPK. Cela avait engendré des réactions généralement à chaud, souvent sur la forme que sur le fond. Beaucoup a été dit sur la création du GPK et sur l’origine d’une telle ineptie. Une ineptie car elle est fondamentalement sans avenir, excepté son utilisation comme faire valoir par ses créateurs et les réseaux qui sont venus s’y greffer.

 

Cette nouvelle « escapade », loin des intrigues et des manipulations, mérite d’être scrupuleusement scrutée sur le plan affectif de son acteur, voir même au delà.

Ferhat est un chanteur et n’a jamais porté un quelconque projet y compris celui de l’autonome. Il suffit de regarder de près son parcours pour se rendre compte de cette réalité.

Il avait sauté d’une organisation à une autre, allant de la gauche vers la droite, rien que pour exister et satisfaire son ego. Sur le plan de la chanson, c’est « un chanteur qui n’arrête pas d’arrêter de chanter », dixit un grand chanteur à la cité universitaire de Oued-Aissi en 1990.

Les projets sur l’autonomie qui existent en Algérie sont connus de tout le monde. Il y a eu d’abord celui du FFS paru dans sa plate forme de mars 1979 intitulée : « L’alternative démocratique révolutionnaire à la catastrophe nationale ». Dans cet avant projet, le FFS parlait de « l’autonomie personnelle, de l’autonomie locale et de l’autonomie régionale ». Ce projet sera connu durant les années 90 sous le non de « régionalisme positif ».

Un autre projet d’autonomie a été prôné par Salem Chaker et celui-ci était linguistique, connu sous l’appellation de : « autonomie linguistique ».

Mouloud Lounaouci a travaillé sur le sujet et c’est sa mouture qui a été adopté par le RCD. Le dernier projet connu est celui sur lequel travaillaient et travaillent toujours d’anciens activistes de l’université de Tizi-ouzou comme Ait Bachir, Aziz Tari, Malika Baraka…

Sur le fond, le chanteur Ferhat n’est porteur d’aucun projet d’autonomie. Il a eu à surfer sur le travail fait par d’autres pour en faire un fond de commerce. Comme tous les chanteurs, l’autonomie pour lui n’est qu’un poème, une chanson qui rapporte. L’essentiel est de voir les caisses pleines, importe peu le contenu de la chanson. L’important c’est que l’album se vende bien.

Pour annoncer la création du GPK, le chanteur Ferhat n’avait pas organisé un événement politique ou une conférence de presse. Mais il avait loué la salle des spectacles de la Porte de Versailles où s’étaient produit un mois avant Ait Menguellet et Akli Yahiaten. Il n’avait pas besoin d’une action politique, mais d’un spectacle. Il avait besoin d’une scène pour se produire, d’un public admiratif pour l’applaudir ; il avait besoin d’être reconnu par ses fans, d’être consacré meilleur chanteur quelques en soient les paroles et la musique.

Dans le fond, cette « problématique» n’est pas étrangère à l’histoire de la lutte pour la reconnaissance du berbère en tant qu’identité, langue et culture. Les conditions difficiles de l’époque, la répression qui s’abattait sur les militants politiques et les autres aléas de la clandestinité, avait fait que le discours entendu et répondu était celui porté par les chanteurs et les poètes.

La situation avait fait que ce n’était pas le discours politique (la raison) qui était vulgarisé, mais c’était le sentiment politique (l’émotif) véhiculé par les chanteurs. Au point où des pans entiers de la société attendaient patiemment la sortie de l’album de tel ou tel autre chanteur pour se situer soit disant politiquement. Quand aux vrais discours des partis politiques, ils ne dépassaient pas les cercles militants et étaient presque inaudibles. Pourtant la région foisonnait de partis politiques essentiellement de gauche. Le sentiment politique était en partie l’une des causes de la perte d’un mouvement extraordinaire comme le MCB, en lui ôtant des revendications qui avaient constitué sa trame dès sa naissance : la démocratie, les langues populaires, l’arabe algérien…

Le sentiment politique, proie à toutes les manipulations, avait pris le dessus sur le politique et les chanteurs étaient devenus des leaders politiques.


Source: LeQuotidienAlgerie.Org


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