À trois semaines de son départ de la mairie, Pierre Bourque joue au père Noël avec son personnel politique, a appris La Presse.

La Ville de Montréal vient d'accorder des indemnités de départ de huit à 20 semaines à neuf employés contractuels du cabinet politique du maire sortant, lesquels seront tous re merciés à la fin de l'année et dont au moins deux n'avaient même pas accumulé une année d'expérience à la Ville. Au total, ces indemnités coûteront près de 300000$ aux Montréalais.

Par ailleurs, selon ce qu'a appris La Presse, le comité exécutif dirigé par Pierre Bourque a octroyé mercredi une subvention de 10,000$ à un organisme communautaire, le Centre maghrébin de recherches et d'information, présidé par un conseiller spécial du maire, Tarik Mihoubi, ainsi que la conjointe de ce dernier, Nora Derbal. Pis encore: le responsable de ce dossier à la Ville qui a suggéré au comité exécutif d'accorder la subvention de 10000$ est... le même Tarik Mihoubi, selon le sommaire décisionnel que La Presse a obtenu!

«Pierre Bourque n'a jamais semblé comprendre ce qu'est un conflit d'intérêts, et il ne comprend toujours pas, a déclaré le chef de l'opposition et vice-président du comité exécutif de la nouvelle ville de Montréal, Michel Prescott. Pour moi, c'est clair qu'il s'agit d'un conflit d'intérêts inacceptable.»

«Je suis en état de choc! Comment est-ce que le comité exécutif a pu accepter un dossier aussi tordu?» demande le conseiller de Snowdon, Marvin Rotrand.

Du côté du cabinet du maire, personne n'a voulu répondre aux questions de La Presse, hier. Ce n'est pas la première fois que M. Mihoubi profite des largesses de l'administration Bourque. Au printemps, le Centre maghrébin de recherches et d'information avait déjà obtenu deux subventions de la Ville totalisant 32000$. À l'époque, M. Mihoubi était aussi l'un des dirigeants de Vision Montréal, le parti du maire Bourque. Responsable de l'organisation électorale à Vision Montréal, M. Mihoubi a été embauché par la Ville en avril, pour la durée de la campagne électorale. Son contrat devait prendre fin le 31 décembre.

Durant la course électorale, à la suite d'une série de reportages de La Presse, le maire Bourque avait dû mettre à pied temporairement quelques employés de son cabinet politique parce qu'ils occupaient, aux frais de la Ville, une grande partie de leur temps de travail à faire progresser la campagne du maire. Tarik Mihoubi était de ceux-là. Est-ce pour le récompenser pour son bénévolat dans la campagne?

En dépit du fait que la Ville ne l'ait eu comme employé que neuf mois, et en plus de la subvention de 10000$ accordée cette semaine au Centre maghrébin de recherches et d'information, M. Mihoubi vient d'obtenir une indemnité de départ d'une durée de huit semaines, à compter du 1er janvier 2002.

«Ça me semble particulièrement généreux pour un emploi qu'il n'a occupé que durant huit mois, souligne Marvin Rotrand. Est-ce que le comité de transition ne pourrait pas empêcher toutes ces dépenses qui engagent la nouvelle administration?»

Selon Michel Prescott, la décision appartient au comité exécutif du maire Bourque, puisque l'argent versé a été tiré d'une enveloppe budgétaire discrétionnaire. La décision ne pourra donc être renversée par le conseil.

Généreuses indemnités

M. Mihoubi n'est par ailleurs pas le seul membre du cabinet du maire sortant à avoir obtenu une généreuse indemnité de départ. Le chef de cabinet, Serge Gosselin, recevra l'équivalent d'une année de salaire, soit plus de 116000$, à compter de janvier. À la Ville, on explique qu'une telle indemnité lui sera versée parce que son contrat devait préalablement prendre fin le 31 décembre 2002.

Les attachées de presse Madeleine Champagne et Michaëli Cantero, ainsi que le conseiller spécial du maire Allan Patrick vont pour leur part recevoir chacun 20 semaines de salaire, toujours à partir de janvier. Trois autres conseillers du maire, Claude Hill, Patricia Rimok et Diane Leblanc, ont obtenu une indemnité de 10 semaines, tandis que Cécile Gladel et Claude Baillargeon auront droit à huit semaines.

Tous ces employés du cabinet de Pierre Bourque ont, à un moment ou à un autre, participé à la campagne électorale du maire sortant, cet automne. La plupart étaient des contractuels «sans but de permanence», ce qui signifie qu'ils doivent normalement quitter leurs fonctions dès que le maire s'en va.

Michel Prescott rappelle qu'en 1994, Jean Doré s'est montré beaucoup moins généreux envers ses proches conseillers. Par exemple, son chef de cabinet, Jean-Robert Choquet, employé de la Ville pendant huit ans, avait reçu trois fois moins d'argent que ce qu'obtiendra M. Gosselin, qui a été embauché en mars 2000 par M. Bourque.

Source: http://www.cyberpresse.ca/reseau/actualites/0112/act_101120044092.html