L'exil et le pays d'accueil

Labess est une formation algéro-québècoise composée de l’auteur-compositeur-interprète Nedjim Bouizzoul, accompagné par le clarinettiste Pierre-Emmanuel Poizat, Nemo Venba à la trompette, Tacfarinas Kichou, aussi connu sous le nom « Le derbouki aux doigts d’or » et Guillaume Landry aux percussions et enfin, non des moindres, la bassiste mais qui ne manque pas de puissance, Blanche Baillargeon.

Ensemble, en comité restreint ou en solo, ils ont fait un bon bout de chemin avec leur premier album Tout va bien, dont les deux chansons les plus connues sont incontestablement Dawina et Babour el Leuh.

Grâce à leurs expériences personnelles en tant qu’artistes indépendants ou membres d’autres formations, le groupe atteint une maturité et une profondeur qu’on perçoit dans la qualité de leur deuxième album, Identité. Labess livre au public un album d’un genre nouveau, mélangeant le chaabi traditionnel au flamenco et à la rumba gitane; en passant par la samba, le reggae et le gnawi; la formation possède un éventail musical intéressant et harmonieusement diversifié.

Le voyage a forgé ce groupe, de l’ouest canadien jusqu’en  Palestine, en passant par la Jordanie, la Bosnie, la Tunisie et la France. Le groupe a vu, chanté et rencontré des artistes de tous genres qui ont apporté tous leur apprentissage à l’expérience de Labess.

Pierre-Emmanuel Poizat intègre les cuivres ingénieusement, des instruments très présents pour Labess, innovateurs dans la musique algérienne et qui donnent une profondeur et une facette intéressante aux différentes chansons.

A travers son apprentissage solo, Nedjim mélange parfaitement la guitare flamenco ainsi que les rythmes rumba avec le chaabi pour faire revivre certains textes traditionnels algériens tels que Echamaa, une reprise moderne et joyeuse de la chanson de Kamel Messaoudi,  qui représente une influence incontestable pour le chanteur. Bechar el Khir, un ancien texte traditionnel encore, ode de paix et de réconciliation avec la patrie, est présent dans l’album avec une sobriété captivante.

L’album chante l’exil, célèbre la tolérance et l’amour avec une touche de mélancolie. Le chanteur dévoile une fenêtre vers sa sensibilité, qu’on perçoit rarement, notamment à travers la chanson Valerie, très intime, enregistrée uniquement avec guitare et voix.

Interroger sur la place qu’occupe l’Algérie dans le deuxième album, Tacfarinas nous dit : « L’Algérie reste au centre, Nedjim a trouvé d’autres façons de parler de l’Algerie, mais c’est la source »  En effet, cet album chante l’Algérie et le Québec de façon équilibrée; on y trouve la difficulté de l’exil et le bien-être dans la terre d'accueil, le temps qui passe, trop vite, et les gens qui partent trop tôt, comme le décrit la chanson Djezou Lyem.

Plusieurs autres artistes ont participé à cet album, comme Nathalie Cora (kora) André Vanderbiest (basse), Michel Seguin Junior (percussions) et l’auteur-compositeur-interprète Tomás Jensen sur la chanson Djezou Lyem.

L’album mis en vente depuis le 20 mai fait tranquillement son chemin vers les portes infinies d’internet et sans doute bientôt en Algérie.

Source: Bab edd'Art

Première partie du reportage "identité(s)-Nedjim Bouizzoul", réalisé par Rosa Hamadouche, pour Bab edd'Art