Le festival a déjà attribué son premier prix, en 2004, à Un rêve algérien de Jean-Pierre Lledo et, en 2003, à Rachida de Yamina Bachir Chouikh

Les journées du cinéma africain et créole qui se déroulent à Montréal depuis plus de deux décennies ont toujours été l'occasion pour le cinéma algérien de briller grâce, d'une part, à la présentation régulière de nombreuses réalisations qui faisaient baver d'envie de nombreux pays du Sud et, d'autre part par la qualité des films qui raflaient souvent prix et distinctions.

Cela ne semble plus être le cas pour la 22ème édition du festival «Vues d'Afrique» qui s'est déroulée cette année du 20 au 30 avril 2006 à Montréal. En effet, dans cette édition la présence algérienne s'est limitée à celle de Mohammed Chouikh avec son dernier film Douar de femmes qui s'est aligné en compétition parmi les douze longs métrages pour décrocher le grand prix du festival. Pourtant, avec un seul film en lice, le cinéma algérien a, encore une fois, cartonné. Douar de femmes a remporté, dimanche dernier, le premier prix du long métrage, prix de la communauté interculturelle, du festival.

Cependant, et fidèles à la tradition d'honorer un pays d'Afrique s'étant illustré dans le domaine du cinéma, les organisateurs ont aussi fêté le cinéma marocain, qui fait preuve, depuis quelques années, d'un dynamisme certain en produisant en moyenne une quinzaine de longs métrages, performance remarquable obtenue grâce aux efforts incessants des responsables de ce secteur qui bâtissent lentement mais sûrement une véritable industrie du cinéma. En effet, depuis quelques années, le Maroc aligne des succès incontestables en matière de production cinématographique et a tout simplement occupé une place laissée vacante depuis quelques années par l'Algérie, il est vrai, occupée à lutter contre le terrorisme qui a enfoncé la cinématographie dans l'oubli.

La grande fête du cinéma africain et créole a fait la partie belle aux films africains et 125 films ont été présentés aux milliers d'amateurs qui, chaque année reviennent encourager, mais surtout admirer le «vrai cinéma» fait avec peu de moyens et au prix d'innombrables difficultés rencontrées par des réalisateurs tenaces qui croient en le 7ème art et aux vertus de l'image comme vecteur de culture et de support d'identité.

Le festival de cette année dont les principales thématiques sont la femme et le Rwanda, ne se contente pas de projeter les réalisations de la trentaine de pays représentés, mais organise plusieurs autres activités telles que des expositions d'œuvres d'art d'artistes africains, tables rondes et colloques. C'est d'ailleurs dans ce contexte que le film de Mohammed Chouikh est présenté. Le film du réalisateur algérien le plus connu à Montréal (un hommage particulier lui a été consacré lors de la 19ème édition), a été bien accueilli, malgré l'inexistence de sous-titrage sur la copie projetée, lors de la première présentation au public dans la belle et immense salle de cinéma du centre-ville, Cinéma Impérial, qui a attiré la grande foule.

La présence à Montréal du réalisateur de l'Arche du désert, la Citadelle et de Youcef, ou la Légende des sept dormants a été l'occasion pour la Tribune d'évoquer avec ce producteur culturel les problèmes du cinéma algérien, de son éternelle réorganisation, de sa régression qui n'en finit pas et qui n'émerge du fond de l'abîme que lorsque des événements internationaux viennent justifier l'injection artificielle de fonds sans grande conviction. Mohammed Chouikh qui connaît bien le cinéma algérien pour avoir été devant et derrière la caméra et qui complète son profil en épousant le métier de producteur, semble quelque peu désespéré face au dépérissement du cinéma algérien. Il estime qu'il est temps de mettre fin à cette agonie malheureuse du 7ème art en légiférant pour adapter les conditions juridiques d'exercice de la profession qui datent de 1968 alors que la mondialisation impose de nouvelles règles de jeu. Nous retiendrons de cette interview qui paraîtra dans notre prochaine édition, que peu de choses ont évolué dans ce domaine et que le constat qu'il a établi déjà (voir la Tribune d'avril 1998) est toujours d'actualité.

En plus de l'Algérie, le festival Vues d'Afrique 2006 a regroupé cette année des œuvres cinématographiques d'Angola, d'Afrique du Sud, du Maroc, du Gabon, de Tunisie, du Sénégal, du Cameroun, de la RD Congo, du Rwanda, de Guadeloupe, de Martinique, du Burkina Faso, de l'Ile Maurice, de l'Ile de la Réunion, de Guinée, du Mozambique, du Bénin, du Burundi, de Madagascar, et de Trinidad et Tobago. Des œuvres réalisées sur l'Afrique par des cinéastes vivant en France, Belgique, Italie et au Portugal ont été également présentées.

A noter que l'Algérie était également présente avec, 40 ans après, le retour, un documentaire de 52 minutes du cinéaste algérien, Hamdaoui Mansour, qui raconte le pèlerinage que des Français natifs d'Oran ont effectué, 40 ans après l'indépendance de l'Algérie, sur les lieux qui les ont vus naître.

Source: http://www.latribune-online.com/0205/culture.htm