Pendant que le déclin de la pratique religieuse complique les efforts de reconstruction de l'église gatinoise Saint-Paul d'Aylmer, la communauté musulmane n'a pas tardé à se mobiliser pour payer l'achat et les rénovations d'une toute nouvelle mosquée, à peine 300 mètres plus loin.

Installée dans l'ancienne succursale de la Banque Nationale, sur la rue Park, la Mosquée d'Aylmer réussit à défrayer les coûts d'achat de l'immeuble et des travaux à réaliser uniquement avec les dons provenant de la communauté musulmane de la région.

Le responsable de la mosquée, Mohamed Bouhlel, a indiqué que le projet total est d'environ 1,2 million $. Propriétaire de l'édifice depuis juin dernier, l'association musulmane a déjà amassé environ 300 000 $ auprès de la communauté, sa seule et unique source de financement.

Moins de 300 mètres plus loin, l'avenir de l'église Saint-Paul d'Aylmer est toujours incertain. Le conseil de fabrique de l'église, détruite par un incendie criminel en juin 2009, doit se résoudre à aller de l'avant avec comme seul argent celui provenant des assurances, soit 3,5 millions $. Les dons provenant de la communauté, amassés au cours de la dernière année et demie, atteignent environ 100 000 $.

Le porte-parole du conseil de fabrique, Richard M. Bégin, avait déjà indiqué que le projet de reconstruction allait être réalisé même sans réponse claire de la Ville de Gatineau quant à une éventuelle aide financière.

Moins de paroissiens

Au-delà des relations tendues avec les autorités municipales, la baisse de la pratique religieuse chez les catholiques vient aussi compliquer la recherche de financement.

« Dans les années 1940 ou 1950, il y avait beaucoup plus de paroissiens pour participer, et les autorités publiques seraient venues donner un coup de pouce, mais là elles nous mettent plutôt des bâtons dans les roues, déplore M. Bégin. [...] Il y a une quarantaine d'années, on disait que la paroisse Saint-Paul d'Aylmer regroupait 10 000 âmes. Sur ces 10 000, aujourd'hui, il y en a peut-être 600 ou 700 qui donnent entre 25 cents et cinq dollars chaque dimanche, alors en tenant compte des frais de fonctionnement habituels, comme le chauffage du presbytère, ça suffit à peine. Même avant l'incendie, on bouclait difficilement le budget. »

Le contraste est « frappant » avec la mobilisation pour le financement de la Mosquée d'Aylmer, admet Richard M. Bégin. Une mobilisation similaire avait été observée au sein de la communauté musulmane de l'Outaouais pour la construction d'une mosquée flambant neuve sur la rue Lois, dans le secteur Hull. L'édifice, inauguré à l'automne 2008, avait permis à plusieurs musulmans d'éviter d'avoir à se déplacer vers des mosquées sur la rive ontarienne.

La communauté musulmane est en croissance dans la région, et la pratique l'est aussi, affirme Mohamed Bouhlel, ce qui explique selon lui l'appui moral et financier donné à la Mosquée d'Aylmer.

Alors que les plus jeunes générations issues de familles catholiques ont délaissé en masse la pratique, M. Bouhlel affirme que la transmission des valeurs islamiques est toujours très importante, de sorte que la pratique continue de croître.

Plusieurs facteurs peuvent expliquer cette croissance, selon M. Bouhlel. La croyance demeure forte, croit-il, parce que « nous savons qu'on sera jugé après la mort, et qu'on va avoir une autre vie ». La communauté continue à organiser diverses activités de financement afin d'assurer les paiements de l'immeuble et des autres phases de rénovations qui restent à être entreprises.

Source: Le Droit