Où est la flamboyante Algérie qui rayonnait sur la diplomatie du Tiers-Monde dont elle a été longtemps le porte-drapeau ? Où est cette Algérie que feu Amilcar Cabral appelait « la Mecque des révolutionnaires » et qui donnait asile à tous les progressistes persécutés du monde ? Où est cette Algérie de Novembre qui était respectée et écoutée à travers les cinq continents ? Depuis une dizaine d’années, notre pays est tombé dans un coma diplomatique profond. Sa voix s’est tue sur la scène internationale et elle n’est plus citée parmi les pays non-alignés qui ont une influence sur la scène mondiale où, désormais, le Brésil, l’Inde, l’Afrique du Sud, la Chine et l’Arabie Saoudite occupent la scène. Pire, l’Algérie d’aujourd’hui est outragée, insultée, méprisée. Pourtant, elle ne réagit pas. La dernière provocation en date est venue de M. Brice Hortefeux, le ministre français de l’Intérieur. Il a annoncé avoir mis au point une liste de sept pays dont les ressortissants doivent fournir aux compagnies aériennes toute leur filiation s’ils veulent se déplacer en France, sous peine de sanction. Parmi eux, l’Algérie aux côtés de l’Afghanistan, du Pakistan, du Yémen, de la Somalie, du Mali et de la Syrie.

Ainsi, notre pays qui est loué pour sa participation à la lutte antiterroriste, se retrouve sur une liste noire. En plus, on demande à notre compagnie nationale Air Algérie d’être un auxiliaire de la police française en fournissant des détails sur ses passagers. Trop c’est trop. Les officiels algériens ont préféré se taire, sinon se terrer, au lieu de demander des explications. Faire la politique de l’autruche est devenu une forme de diplomatie. Ils ont bien réagi de la même façon lorsque Bernard Kouchner, le ministre des Affaires étrangères, a tenu des propos désobligeants à l’égard du ministre des Moudjahidine, à la veille d’un voyage à Alger.

Ou aussi le silence lors de l’affaire Hasseni. Même les Egyptiens s’y sont mis avec véhémence dans l’outrage à l’Algérie à cause d’un simple match de football. On comprend qu’on ne répond pas à l’invective et aux insanités quand elles viennent de la presse, des avocats ou des milieux culturels. Mais on ne comprend pas le mutisme algérien quand le ministre égyptien des Affaires étrangères, Aboul Gheït, déclare textuellement, dans la « bataille avec l’Algérie », que son pays avait envisagé un moment d’envoyer 3000 hommes des forces spéciales munis d’armes blanches à Khartoum. On ne sait pas où veut en venir le régime de Hosni Moubarak dans son escalade verbale à l’égard de l’Algérie. Par contre, l’absence de réaction à des propos tenus par un homme d’un tel rang officiel a de quoi inquiéter. L’Algérie est-elle orpheline de dirigeants à poigne ? Ceux qui la gouvernent actuellement font-ils le dos rond parce qu’ils ont peur de quelque chose que le citoyen ignore et qu’il tente de deviner, le laissant échafauder des hypothèses ? De toute évidence, les Algériens sont étonnés et ont le droit de s’interroger.


Source: El Watan - Edition du 3 janvier 2010