Le monde de la culture algérienne vient de perdre un grand homme en la personne du regretté musicien Abdellah Kriou l Il a été enterré lundi à Alger suite à une  longue maladie.

Abdellah Kriou  est né le 15 mai 1940 à  Bordj Bou-Arréridj. Il était un compositeur hors pair et  un talentueux violoniste. Il a dirigé d’une  main de maître l’ensemble musical de la Radio nationale algérienne (RTA) en qualité de chef d’orchestre. Détenteur de diplômes de haut niveau, Abdellah Kriou était un parfait érudit.

Les gens qui l’ont approché et suivi sa riche carrière artistique  attestent qu’il incarnait la gentillesse même et la modestie. Le violoniste  Mohamed Mokhtari  révèle  que le  défunt était son élève dans les années soixante à Sétif.  «C’était un grand personnage d’une sensibilité humaine incommensurable. C’était un grand violoniste. C’était un intellectuel de haut niveau, doté de capacités immenses», témoigne-t-il.

Notre source révèle qu’avant de s’accaparer définitivement du violon, Abdellah Kriou avait commencé par le luth. C’est justement Mohamed Mokhtari  qui lui  enseigna les premières leçons de violon. A l’orée des années 60, le défunt rejoint  le chemin du Conservatoire d’Alger pour approfondir davantage ses connaissances.

Chemin faisant et expérience oblige, il commence à fréquenter les milieux artistiques en tant que musicien. Il a accompagné les plus grands noms de la musique algérienne, à l’image de  Driassa, Guerrouabi, en dirigeant leurs  orchestres. Il a particulièrement brillé en 1973 avec la série «Rasd Maya». La plus grande œuvre dans laquelle il a  étalé tout son savoir est incontestablement l’émission «Alhen Oua Chabab», diffusée dans les années 70 sur le petit écran algérien. Il a, en effet, inculqué aux jeunes chanteurs en herbe de l’époque qui, aujourd’hui sont des sommités, tels que Nadia Benyoucef, Nardjès, Youcef Boukhentech, tout son savoir. 

Compositeur confirmé, citons sa collaboration dans la chanson Koursi Fi Djenina, interprétée par la chanteuse Faïza El Djazaïria, dont les paroles sont de Slimane El Djawadi. Fi Khatri est un autre titre dont les paroles sont de Abdelkader Tabli et la composition est de Abdellah Kriou. Les mélomanes se souviennent de l’instrumental  «Mada Ou Mada», diffusé sur les ondes de la radio Chaîne I en 1980. Un morceau qui continue d’être diffusé aujourd’hui, au grand bonheur des nostalgiques.

Avant d’intégrer la Radio nationale, le regretté a eu l’opportunité dans les années 70 de travailler au niveau de l’orchestre symphonique et de l’entreprise nationale de télévision algérienne (ENTV). Abdellah Kriou compte à son actif plusieurs tournées à travers le territoire national. Il est à noter que Abdellah Kriou a travaillé un laps de temps au niveau du ministère de l’Agriculture en qualité de fonctionnaire. Un métier qu’il abandonne très vite au profit de l’univers musical. Il a été remercié de la radio à cause d’un mouvement syndical alors qu’il n’était pas encore près de la retraite. Il est rappelé quelques temps plus tard en qualité de musicien. Il n’y restera pas longtemps.

Abdellah Kriou tentera une petite expérience de deux ans au Maroc avec deux de ses potes.

Le retour au bercail s’est alors imposé de lui-même. Pour sa part, le musicologue Abdelakader Bendemâache témoigne que le défunt était un être sensible et compétent. «ll était doué sur le plan de la connaissance musicale. Il était l’un des plus grands lettrés de l’époque. Il était d’un degré d’intelligence et d’une sensibilité extrême. C’était un professionnel avec qui j’ai eu du plaisir à travailler.» Abdellah Kriou s’est retiré du milieu artistique depuis pas loin d’une dizaine d’années à cause d’une méchante maladie. 

Un  film documentaire intitulé Hanine lui a été consacré sur le grand écran en 1999.  Un seul hommage lui  a été rendu par la wilaya de Bordj Bou Arréridj.Le regretté virtuose Abdellah Kriou laisse derrière lui l’image d’un humble  et un riche héritage musical.   

Source: El Watan - 26/10/2011