Les Tunisiens sont-ils conservateurs, ou libéraux ? Modernes ou traditionalistes ? Il paraît qu’on est tout et son contraire, et notre sursaut religieux n’exclut pas une libération des mœurs. C’est du moins l’image que l’on véhicule dans la presse arabophone, à en croire deux articles parus dans deux organes différents sur la Tunisie…

 

Sous le titre : "Le mariage orfi attire les Tunisiens depuis son interdiction, il y a 54 ans", le site d’alarabiya, rapporte que malgré l’émancipation de la société tunisienne, gagnée par le  mode de vie occidental, et malgré les lois autorisant la mixité entre hommes et femmes dans les lieux publics, des phénomènes refont de temps à autre surface pour rappeler que le Tunisien, homme ou femme, est toujours nostalgique des pratiques de ses aïeux, ayant consacré dans la réalité le mariage orfi, abrogé avec la promulgation du code du statut personnel (CSP), qui a institué le principe du mariage civil, et aboli la polygamie.

En dépit de l’absence de statistiques sur ce phénomène enveloppé par un grand secret pour ne pas tomber sous le couperet de la loi, les journaux tunisiens évoquent épisodiquement, relève al-arabiya, des affaires d’hommes et de femmes qui se sont unis par le mariage orfi, passible d’un an de prison en Tunisie. "Par ailleurs, des statistiques officielles estiment que 80% des garçons et 68 % des filles ont des relations intimes sans aucun contrat de mariage". 

Ce type de mariage, rapporte al-Arabiya par la voix d’un Tunisien ayant assisté à une telle expérience en tant que témoin, est différent de ce qui est à l’usage en Orient, car, "les deux parties ne concluent pas leur mariage devant un homme de religion mais, d’une manière individuelle, et parfois en présence de deux témoins, où les deux conjoints prononcent successivement la formule suivante : "J’atteste devant Dieu, que je me suis uni(e)  à lui (ou à elle) par les liens du mariage".

Le retour des koutebs en Tunisie

Exit le relâchement de mœurs, place à la religiosité. Sous le titre "Tunisie, les koutebs concurrencent les jardins d’enfants", le site du journal émirati emaratalyoum, rapporte dans son édition de ce vendredi, que les écoles coraniques frappent en force en Tunisie, après qu’elles aient été sur le point de disparaitre pendant la colonisation française, et durant le règne de Habib Bourguiba 1956-1987, premier Président de la Tunisie indépendante. "Bourguiba avait supprimé l’instruction religieuse, la considérant comme une éducation traditionnelle, et incompatible avec son projet de construction d’un Etat moderne".

Le programme de réforme des écoles coraniques que l’Etat tunisien a lancé en 2002 a réhabilité les koutebs, laisse entendre le journal. Le but était d’enraciner les générations montantes dans leur identité arabo-musulmane, et de leur inculquer les valeurs de modération et de tolérance.

"Les koutebs se trouvent au sein des mosquées et les zawiyas relevant du ministère des Affaires religieuses, dont le rôle est de mettre en exécution la politique de l’Etat dans le domaine religieux, et de bannir les dangers de l’enfermement et de l’extrémisme", ajoute emaratalyoum.

Ils sont ainsi devenus un grand concurrent des jardins d’enfants en Tunisie, dans la mesure où ils accueillent des milliers d’élèves par an, en âge préscolaire. Selon les dernières statistiques officielles, on dénombre 1186 koutebs à la fin de 2009, des chiffres sans précédent dans l’histoire de la Tunisie.

Ces écoles coraniques sont d’ores et déjà dans l’incapacité de répondre aux demandes grandissantes des parents,  ce qui a amené le ministère des Affaires religieuses à publier une circulaire, appelant à ce que le kouteb soit une composante principale des nouvelles mosquées.

Le retour au kouteb s’explique, conclut le journal émirati, par le sursaut religieux que vit la société tunisienne, du fait de l’influence des chaînes satellitaires qui ont ravivé l’envie des parents d’éduquer leurs enfants, selon les valeurs et préceptes islamiques.

 

Source: Gnet