Plus de 150 citoyens de Saint-Michel étaient rassemblés à la Maison du citoyen le 23 février dernier pour exprimer leurs insatisfactions envers les dernières manifestations de joies survenues dans le Petit Maghreb. Ils étaient venus participer à la discussion initiée par le poste de police de quartier 30 sur les évènements résultant des derniers matches de qualification des équipes de foot de l’Afrique du Nord.

La police de Saint-Michel avait envoyé 1 800 invitations aux résidents voisins de ce qu’il est maintenant convenu d’appeler le Petit Maghreb de la rue Jean-Talon pour cette soirée discussions. Le but était de faire le point sur les célébrations spontanées qui ont suivi chaque match de soccer des pays maghrébins de juin à janvier dernier et d’entendre les revendications des citoyens afin de prévoir l’encadrement policier en vue de la Coupe du monde 2010.

Après un mot de bienvenue, le commandant du poste 30 Fady Dagher a fait un rappel des évènements et notamment de la qualification officielle de l’Algérie du 18 novembre contre l’Egypte. Cette soirée a représenté « un pic d’appels à la police, avec quarante six appels pour des problèmes de circulation, de klaxons, de feux d’artifice, des entrées privées bloquées par du stationnement illégal », a-t-il énuméré.

Après ce bref rapport, il a laissé la parole aux citoyens pour un tour de questions. Parmi les personnes présentes, une cinquantaine est intervenue devant le commandant Dagher et son adjointe Micheline Bourret. Au passage, certains ont déploré l’absence d’Anie Samson.

Presque tous ont exprimé la même exaspération contre la mesure de fermeture de la rue Jean-Talon dans la zone du Petit Maghreb. La deuxième revendication principale concernait le tapage à la fin des matches, un riverain s’est emporté. « Il faudrait évacuer les gens après le match et confisquer les tamtams qui leur servent à se rassembler ! » Certains citoyens ont aussi exprimé leur irritation envers les jeunes qui profitent du climat d’agitation pour grimper sur les toits et les terrasses des maisons.

Surenchérissant quelque peu, une ménagère s’est écriée : « Nous sommes pris en otage ! Je vis au Québec, pas en Algérie. On est obligé de se barricader à l’intérieur car on est terrorisé. S’il vous plaît, aidez-nous et sécurisez-nous dans nos maisons ! », a-t-elle scandé. D’autres ont voulu dénoncer ce qu’ils vivent comme une injustice. « Les Maghrébins sont intouchables ici, si des Québécois commettaient les mêmes délits, ils seraient arrêtés. C’est que la police a peur d’intervenir ! Sincèrement, on aurait le goût de quitter le quartier ». Plus généralement, les citoyens ont exigé l’affectation d’un plus grand nombre de policiers au Petit Maghreb. Dépités par la tournure qu’a pris la rencontre, les quelques membres de la communauté maghrébine venus y assister ont quitté la salle.

Au terme du tour de parole, le commandant Dagher a remercié les citoyens d’être venus, avant de répondre à chaque question avec un calme inébranlable. « En premier lieu, la loi au Québec ne permet pas à la force policière d’interdire une manifestation ». Il a rappelé que plusieurs policiers dont certains en civil étaient répartis dans le secteur à l’occasion des matches, et qu’ils travaillaient en coopération avec des médiateurs maghrébins dont l’aide s’est avérée très bénéfique. « Je suis obligé de fermer la rue Jean-Talon à la circulation, lorsqu’on prévoit jusqu'à 7000 personnes rassemblées, c’est pour la sécurité de tous. », a-t-il poursuivi. « Pour le bruit et le stationnement illégal, je m’engage à faire respecter les règlements tout au long de l’année.»

Le commandant a souligné l’efficacité des policiers de Saint-Michel en précisant que depuis cinq ans, aucun n’avait demandé sa mutation. Pour finir, il a diffusé des photographies des évènements post-match de soccer en Europe, montrant des voitures en flammes et des affrontements entre manifestants et policiers. « Selon moi, le rôle de la police de quartier est plutôt préventif que répressif ».

Il a ensuite exposé des photographies prises au Petit Maghreb représentant des supporters aux couleurs de l’Algérie, fêtant une victoire en dansant dans les rues et en s’enlaçant. « Selon moi, plus on met de policiers à chaque coin de rue, plus on alimente un climat de tension et de provocation. » a-t-il expliqué avec perspicacité.

Source: Journal communautaire Le Monde