Un bilan sarcastique de la visite de nos glorieux

 

Ma grand-mère, que Dieu ait son âme, disait tout le temps à sa belle fille, ma mère, «ce gars-là est extra joyeux, il ne peut  pas vivre sans se trémousser sur la moindre trame sonore.  Il bouge ses fesses sur  un toussotement   et sur le bruit  d’un bris de verre».

Tout cela est vrai.  La joie de vivre est mon univers.  Dans une bringue, je suis comme un poisson dans l’eau ou tout simplement, comme un oiseau dans  le  ciel.

L’allégresse et la gaieté sont ma jubilation.  Je danse sur la musique que j’aime, que je comprends et que je sens.  Je joue au foot comme tout le monde.  Je ne suis pas bon et je ne suis pas pourri non plus.  Je suis dépourvu de pré-requis pour coacher ou aider à coacher avec le coach.  Je ne suis ni le beau frère ni un ex chauffeur de taxi.

Comme tous les fous nostalgiques, je me suis rendu à l'aéroport Pierre Eliot Trudeau.  L'animateur grigri attendait Zoubir Bachi et Ali Benchikh. Moi, j'attendais, la vraie Gazelle, Tedj Benshaoula et non pas Abdelkader Mazelle (pas encore).  Aussi, je guettais l’arrivée de Hafid Tasfaout et Nesreddine Drid.  J’ai eu 2 sur 3 et l’animateur à son tour, a eu qu’un sur deux.

Je m’attendais à voir un autobus de luxe pour transporter nos glorieux verts.  Hélas, à la sortie, les glorieux invités se bousculaient sur les voitures privées comme on faisait aux mariages lors des cortèges.

L’organisateur Vancouvérois, vêtu depuis l’arrivée de Zidane en 2009, de son survêtement de l’Olympique de Marseille, était extraordinairement perdu et confus dans les limbes.

Tellement  enchanté par le contact direct avec des gens que je regardais autrefois, à la télé ou sur des gradins d’un stade, j’ai oublié, avant de partir à l’aéroport, de prendre mes médicaments que le spécialiste en troubles de « régionalophobie » m’avait prescrits.  Il y a eu quelques éboulements, mais rien de grave, juste des mineurs et rien de majeur, tout était sous contrôle.

Bon sang, ce Vancouvérois nous prend-il pour des caves ou quoi?

Selon son soi-disant calendrier publicisé, le samedi suivant l’arrivée des stars, je me suis précipité sur les artères du Petit Maghreb afin d’acheter mes billets pour le match et aussi pour être parmi les premiers arrivés afin d’être le premier à recevoir des chandails périmés à l’achat d’un billet de stade.

Deux billets pour soixante dollars canadiens.  Le jeune vendeur était généreux, il m’a donné trois chandails (Très extra large).  Ma femme fut toute contente des guenilles à vaisselles cent pour cent coton.

De bonne heure, avant même le chant du coq, les familles drapées à l’effigie des couleurs nationales étaient présentes  au  Petit Maghreb. Il y avait au menu, l’arrivée des glorieux joueurs à partir de 11 heures.

L’ennui et l’attente obligeaient à faire le tour du Petit Maghreb à répétition.  On ne peut admirer les artères et les belles choses en un tour en cinq minutes.

Les familles se sont retrouvées au milieu des regards des clients fumeurs des cafés du quartier. Ce n’est pas grave, c’est du Hna fi Hna.

C’était très bien organisé à cent pour cent à l’algérienne.  Les glorieux entourés des organisateurs sont arrivés à l’heure indiquée au menu.  À 14 heures et demi au lieu de 11 heures.

Au fait, il y avait plusieurs organisateurs et plusieurs montréalais convertis en  Vancouvérois.  Le pauvre peuple a été empêché par des dobermans de quêter des autographes.  Nos glorieux ont été dirigés directement dans la gargote pour les gaver afin de faire du foie gras.

Ils sont partis, après, prendre le café  au Safir avant d’aller chez le consul.  Tant pis pour le peuple.  On vous attend à Claude Robillard.

Pour une deuxième fois, le pauvre peuple était au rambot avant le rendez-vous et le match a commencé à l’heure exacte avec, à peu près, une heure et trente de retard.  Ce sont des secondes dans notre culture.

La cerise sur le sundae est le souper dansant du soir au Baron italien.  Comme je ne suis pas célèbre, ai- je suis  passé par plusieurs postes de vérification et mon billet d’entrée, à soixante dollars, a été maintes fois montré.  Je pense que je  dois avoir un petit air de persona non grata.

Le plus beau dans tout ça, c’est que j’ai eu droit à une vérification avant le repas et plusieurs en cours de repas.  Une chance qu’il n’y avait que deux services et demi.  Le demi pour l’eau à bar open.

L’animateur grigri, n’étant pas capable de supporter l’ambiance, a lâché le morceau et a claqué la porte.

Pour ma part, j’ai pu danser avec les deux Hafid, Lakhdar et Chaabane et j’ai fais signer la veste de sport à mon fils par presque tous les joueurs.  Tout un grand exploit, mais il faut juste expliquer à la maman que la fringue n’est pas à laver.

Et la cerise sur le sundae, pour être civilisé, ou la goute causant le déluge, pour les pessimistes, c’est que nos glorieux, deux jours après la fête, étaient à la recherche active des Tentes des Enfants de Don Quichotte au bord du vieux port de Montréal en se croyant au canal Saint Martin de Paris.  Du jour au lendemain, Merzekane, Kouissi, Korichi et Drid sont devenus des itinérants à la recherche d’un toit ou d’un abri pour passer la nuit.

L’adage anglais dit Wait and see, mais pour le cas présent, on doit le remanier à wait to see (3ich Tchouf).